Enfants et ados en pédopsychiatrie : Unicef donne des pistes pour améliorer leur bien être

Dans le cadre de son projet participatif « What do you think ? », Unicef a permis à 150 enfants de 6 à 17 ans suivis en pédopsychiatrie de s’exprimer sur leur vie quotidienne, leurs espoirs ou encore leurs craintes. L’ONG a compilé tous ces témoignages dans un rapport et a tenté de dégager des pistes pour améliorer leur bien-être. 

Selon les dernières estimations de l’Unicef, plus de 16,3 % des adolescents âgés de 10 à 19 ans en Belgique sont atteints d’un trouble mental diagnostiqué selon les termes de la définition de l’Organisation mondiale de la Santé. Mais ces estimations sont sans doute la partie émergée de l’iceberg, car beaucoup d’enfants ne sont pas diagnostiqués et la pandémie COVID-19 a fait naître d’immenses préoccupations. C’est pourquoi l’ONG a voulu leur donner une voix pour qu’ils soient entendus. « Nous n’arriverons pas à élaborer des initiatives et des programmes pertinents en faveur de la santé mentale sans écouter la voix des jeunes ni sans leur participation active et leur mobilisation. Les enfants et les adolescents concernés par la santé mentale ont beaucoup de choses à exprimer. Peu importe leur âge. Ils ont des choses à dire, des idées, des rêves, des suggestions ; pour peu qu’on leur demande et qu’on les écoute », écrit Unicef dans son rapport.

« What do you think ? » : un projet de plus de deux ans

Grâce à ce volet santé mentale du projet « What do you think ? », qui a duré pas moins de deux années, les 150 enfants et ados interviewés ont réellement été entendus et « décrivent honnêtement leur vie à l’hôpital et en dehors de l’hôpital. Le regard qu’ils portent sur cette parenthèse de soin est lucide, parfois acerbe, toujours touchant. La grande majorité sont extrêmement reconnaissants à l’égard des professionnels qui les entourent mais dénoncent aussi la discontinuité des soins ou l’application de règles qu’ils jugent parfois injustes. À l’hôpital, ils nouent des liens très forts entre jeunes. Mais dans certains cas, la vie en collectivité est difficile. (…) Le manque de temps pour soi, avec sa famille, le besoin de communiquer à l’extérieur, le besoin d’affection. Les souffrances. Les rires aussi. Tout est dit. Rien n’est tu. » 

Pour information, le projet « What do you think ? » est une initiative plus globale qui existe depuis 1999. Chaque année ou presque l’Unicef s’adresse aux jeunes jusque 18 ans pour leur demander leur avis sur l’un ou l’autre sujet de société. L’idée est de leur donner une voix et leur permettre de s’exprimer afin de trouver ensuite des solutions communes pour améliorer l’une ou l’autre situation. Entre 2020 et 2022, c’est donc la thématique de la santé mentale qui a été choisie.

Ce que les enfants préconisent : participer, prévenir et mieux prendre en charge

Les recommandations apportées par les enfants et les ados pour améliorer la santé mentale globale de la jeunesse sont regroupées, dans le rapport de l’Unicef, en trois sections clés :

  • La participation : faire entendre la voix des enfants et les jeunes dans la société dans son ensemble ; écouter l’opinion des enfants et des jeunes et en tenir compte ; faire de la participation des enfants et des jeunes un vecteur de changement pour le bien-être de tous…
  • La prévention : créer des lieux de proximité dans les quartiers ; lutter contre les discriminations liées au genre ; briser le silence et la stigmatisation qui entoure la santé mentale des enfants ; transformer l’école en véritable lieu d’aide ; lutter contre le harcèlement des enfants à l’école et en ligne ; former les professionnels de première ligne…
  • La prise en charge à l’hôpital et en dehors : veiller à ce que l’hospitalisation soit une mesure de dernier ressort ; proposer des thérapies multiples, individuelles ou collectives, qui ne font pas toutes appel à la parole ; faire participer tous les enfants dans la vie de l’hôpital et l’organisation des soins ; faire en sorte que chaque hôpital dispose d’une équipe de professionnels à l’écoute, disponible, bienveillante qui fait progresser les enfants ; plus de temps pour bouger, jouer, se défouler ; une meilleure continuité des soins…

Quelques témoignages d’enfants suivis en pédopsychiatries

Témoignages choisis au sein du rapport de l’Unicef :

« Le démarrage de la thérapie était bizarre. Il a fallu beaucoup trop de temps avant que la thérapie démarre. J’avais l’impression que je n’allais pas pouvoir entrer ici, que mes problèmes n’étaient pas assez graves. » FILLE, 14 ANS
« Ça m’a ennuyé que l’admission ait eu lieu très rapidement,
le lendemain même. Je préférerais qu’il y ait quelques jours d’intervalle pour s’habituer à l’idée. » GARÇON, 14 ANS
« J’étais nerveuse quand je suis arrivée ici mais j’étais contente
de voir le grand jardin. Malheureusement, je n’y ai pas vu de lapin. J’étais nerveuse à l’idée de rencontrer les autres enfants et de jouer avec eux. » FILLE, 8 ANS
« J’aime l’art-thérapie, parce que je peux exprimer mes sentiments sans mettre des mots dessus. » FILLE, 15 ANS
« Parfois, ils posent des questions trop difficiles. Parfois, je ne connais pas la réponse et alors maman doit m’aider. Je me sens alors stressé, si je ne sais pas répondre. » GARÇON, 10 ANS
« Les badges, ça nous donne l’impression d’être dans un asile ou d’être en prison. » FILLE, 15 ANS
« Ici, il y a un lien comme dans une famille et on tisse des relations. Ça va être dur de retourner à la vie d’avant. » GARÇON, 15 ANS
« J’adore les macaronis, j’aime bien aller au cinéma en ville, les spaghettis, un livret pour les urgences, peindre, colorier et fabriquer des balles antistress. » FILLE, 7 ANS
« Je n’aime pas quand ils m’attrapent quand je suis fâchée, quand je dois aller en isolement. » FILLE, 7 ANS
« Le traitement équitable de chaque jeune est très important. Nous souhaitons que chacun soit traité sur un pied d’égalité et ait la possibilité d’être lui-même, de manière juste. » GROUPE DE JEUNES DE PLUS DE 12 ANS
« Nous sommes si peu à la maison. Une petite matinée et une demi-journée. Je suis fâché d’être si peu à la maison. » GARÇON, 9 ANS
Je sais bien parler, mais j’ai du mal à exprimer mes sentiments. FILLE, 15 ANS

En conclusion : « ils veulent pouvoir être eux mêmes en brisant le silence »

Ces enfants hospitalisés ou en suivi pédopsychiatrique ont des rêves, des envies, des besoins. Ils veulent parler et être écoutés, ils veulent être en lien avec d’autres jeunes, ils veulent être aidés ou au moins qu’on vienne en aide à leurs parents, ils veulent un soutien, une aide psychologique adaptée, ils veulent que l’école les comprenne et leur offre un espace bienveillant où leur bien-être serait une priorité, ils veulent un suivi par des professionnels formés et sensibilisés aux troubles de la santé mentale, ils veulent pouvoir être eux mêmes en brisant le silence… Alors, écoutons-les, c’est un minimum !

 

→ Vers le rapport complet de l’Unicef et la multitude de témoignages recueillis

↓ Vidéo liée au projet « What do you think ? »

 

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